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Synesthéorie

Du rôle de l’intuition et de la logique en mathématiques

Par M. Henri POINCARÉ (Paris).

La Valeur de la Science, Paris, Flammarion, 1911

 

Extrait, page 128 :

« Mais comment aperçoit-on ces analogies et ces différences ?

Dans l’exemple que je viens de citer, elles sont presque toujours évidentes, mais j’aurais pu en trouver d’autres où elles auraient été beaucoup plus cachées ; souvent il faut pour les découvrir une perspicacité peu commune.

Les analystes, pour ne pas laisser échapper ces analogies cachées, c’est-à-dire pour pouvoir être inventeurs, doivent, sans le secours des sens et de l’imagination, avoir le sentiment direct de ce qui fait l’unité du raisonnement, de ce qui en fait pour ainsi dire l’âme et la vie intime.

Causez avec M. Hermite ; jamais il n’évoquera une image sensible, et pourtant vous vous apercevrez bientôt que les plus abstraites sont pour lui comme des êtres vivants. Il ne les voit pas, mais il sent qu’elles ne sont pas un assemblage artificiel, et qu’elles ont je ne sais quel principe d’unité interne.

Mais, dira-t-on, c’est là encore de l’intuition. Conclurons-nous que la distinction faite au début n’était qu’une apparence, qu’il n’y a qu’une sorte d’esprits et que tous les mathématiciens sont des intuitifs, du moins ceux qui sont capables d’inventer ?

Non, notre distinction correspond à quelque chose de réel. J’ai dit plus haut qu’il y a plusieurs espèces d’intuition. J’ai dit combien l’intuition du nombre pur, celle d’où peut sortir l’induction mathématique rigoureuse, diffère de l’intuition sensible dont l’imagination proprement dite fait tous les frais.

L’abîme qui les sépare est-il moins profond qu’il ne paraît d’abord ? »

En savoir plus sur l’heuresthésie

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Poincaré intuition mathématiques

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